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Que faire à Figueras ? Cinq coups de cœur de la rédaction

Par Elise Chevillard / Publié le 22.03.2019

Fin 2018, les services de Train Grande Vitesse entre l’Espagne et la France ont fêté leur 5ème anniversaire depuis leur mise en marche. L’occasion de se faire un weekend  -en à peine 6h de train depuis Paris- à Figueras, la surréaliste. Située sur la ligne Paris-Barcelone, desservie entre 2 et 4 fois selon les saisons, cette ville à taille humaine, se laisse parcourir à pied, sur les traces de son enfant le plus illustre : Salvador Dalí. Si Figueras doit avant tout sa renommée au peintre qui le vit naître et mourir, la ville  a un certain charme et possède bien d’autres atouts, notamment culturels.  

Elise Chevillard

©Elise Chevillard

Une invitation à flâner dans ses rues

Il est 19h dans les rues de Figueras, l’animation est joyeuse, les enfants courent sur les petites places croquignolettes de la vieille ville en ce mois de décembre encore trop doux. Vite, il faut régler nos montres  à l’heure espagnole. Point de rencontre des nombreux figuerencos après le travail, pour partager una copa et quelques tapas, la place de la Mairie (plaza del Ayuntamiento) entourée d’arcades, a des airs de petite place de village. Datant du milieu du XVIème siècle, elle a accueilli des marchés de toutes sortes sous ses arcades. De cette place, partent de nombreuses ruelles, pavées de carrelage, et aux façades ocres, tirant sur l’orange et qui donnent à la ville une couleur lumineuse par tous temps.

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Au 6 rue Monturiol, n’oubliez pas d’admirer la façade de la maison natale de Dalí connue sous le nom Casa Puig. L’édifice de style moderniste de 1898 est l’œuvre de l’architecte Josep Azemar. D’autres bâtiments du même style sont présents un peu partout dans la ville. Lieu de rencontre et de promenade, mais aussi de discussion, théâtre de concerts, de foires et de marchés, la Rambla est encore aujourd’hui un lieu où il fait bon voir et être vu. Son origine remonte à 1828, date à laquelle il fut décidé de couvrir la rivière Galligans, pour des questions d’hygiènes. De la fin du XIXe à l’issue de la guerre civile, c’est dans son périmètre que l’on verra se construire le plus bel ensemble de bâtiments de la ville, qui permet d’embrasser en un seul coup d’oeil plusieurs styles d’architectures: baroque, néoclassique, éclectique, art nouveau, noucentista et rationaliste. Aujourd’hui, la Rambla est bordée de platanes, de restaurants, de cafés et d’hôtels où se mêlent des banques et des commerces. Comme par exemple l’hôtel Duran, où Dalí avait pour habitude de séjourner régulièrement. Les murs s’en souviennent encore et l’hôtel est devenu par la force des choses un petit musée où de nombreuses photos, lettres manuscrites écrites par Gala ou encore des décorations honorifiques témoignent de ce passé.

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De la Rambla, prenez la ruelle piétonnière du Forn Nou qui conduit à la Plaça Josep Pla et au Théâtre municipal El Jardí, puis remontez vers l’église de Sant Père où fut baptisée Dalí. Dès le IXème, Figueras s’est étendue autour de cette église dont il est mention dans les archives dès 1020. On arrive ensuite sur la place Gala Salvador-Dalí , créée en 1948, avec sa singulière exposition de sculptures en plein air. On y trouve plusieurs sculptures de Dalí lui-même, un monument à Francesc Pujols, un hommage à Newton, trois sculptures représentant Antonin Mercé Meissonier, l’un des artistes préférés de Dalí ainsi qu’une obélisque de télévisions. Si en journée, la place est un lieu de passage très fréquenté pour se rendre au musée Dalí, le soir, il y règne un calme monacal sous les lumières de l’église.

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Le Théâtre-musée Dalí, objet surréaliste à part entière

Sur la place justement, impossible de louper l’ancien théâtre qui abrite aujourd’hui le musée Dalí , le plus visité en Espagne après le Prado. L’extérieur à lui seul est déjà un régal. Salavador Dalí décora l’ensemble d’œufs monumentaux, symbolique chère au peintre, entre lesquelles s’intercalent des lavabos et des mannequins dorés. Les choux posés sur la façade rose sont un clin d’œil a la Casa de las conchas de Salamanque. Inauguré en 1974, le Théâtre-musée a été construit sur les vestiges de l’ancien théâtre de Figueras, en partie détruit pendant la guerre civile et brûlé par les troupes franquistes. C’est aussi ici que  Dalí  exposa pour la première fois ses peintures. Pour construire ce musée-mausolée, ce génie du surréalisme passa les dernières années de sa vie à l’imaginer pour faire cette ultime œuvre d’art à son image, exubérante, excentrique. La visite est un véritable spectacle surréaliste et ne suit aucun circuit préconçu. Tout a été pensé et conçu par l’artiste lui-même, qui voulait offrir à ses visiteurs une immersion dans son monde. Sur les trois étages, on découvre un large éventail de ses œuvres, depuis ses premières expériences de dessinateur, ses débuts dans la peinture, ses premières influences picturales et jusqu’à ses créations les plus surréalistes.

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Dans le patio, trône une Cadillac arrosée par une fontaine, sous le regard d’une série de mannequins dorés et de sculptures articulées en bronze. Rien d’étonnant. A l’intérieur, un tableau monumentale est mis en scène, encadré d’un rideau rouge sous la grande coupole géodésique en verre, œuvre d’Emilio Perez Pinero.

Dalí n’a pas peint que des montres molles, ni représenté que des femmes à tiroir, on découvre dans ce musée un autre pan de son travail artistique. Il donna libre cours à ses fantasmes, créant des sculptures toutes plus folles les unes que les autres, et nous propose ici des installations fantasques comme le lit avec pieds en dauphins, le plafond du salon noble, ou encore le spectaculaire salon représentant Mae West et ses lèvres sofa. La tombe de Dalí se trouve sous la scène centrale, dans une crypte. On passerait devant sans la voir, signalée seulement par une simple dalle. Quelle étonnante simplicité ici, quelle sobriété, pour celui qui se considérait comme « un génie ».

Dalí ne se limitait pas non plus qu’à un seul moyen d’expression, il a aussi crée des bijoux. Depuis 1982, dans un bâtiment situé à côté du musée, est exposée une collection de 37 bijoux en or et pierres précieuses, et plus de 27 dessins et peintures que Dalí réalise pour les fabriquer entre les années 1941 et 1970,

Museu del Joguet de Catalunya/Figueres. Foto: Jordi Puig

Museu del Joguet de Catalunya/Figueres. Foto: Jordi Puig

Retour en enfance au musée du jouet

Situé dans l’ancien manoir du Baron de Terrades qui donne sur la Rambla, ce lieu est le second musée le plus visité de la ville après celui de Dalí et le troisième musée de jouets le plus important du monde. Véritable cabinet de curiosité pour les éternels enfants, ce musée compte dans sa collection pas moins de 10 000 jouets ( dont la moitié est exposée au public) parfaitement rangés sur 3 étages et par thématique. On retrouve ici l’odeur de l’enfance, cette odeur de jeux anciens tirés de la vieille armoire de sa grand-mère, pour un voyage à travers l’histoire des jouets d’antan et actuels, mais aussi leur origine. La collection d’automates et de petites voitures fera pâlir de jalousie les plus jeunes d’entres nous. Soldats de bois et de plomb, guignols, vieux théâtre, maisons de poupées, jeux de plein air, jeux de magie, toupies, trains miniatures, avions, patins,  poupées,  jeux de cartes et de société, jeux pour aveugles…Chaque jouet nous raconte une histoire, une anecdote autour de sa création, comme cet ours, adoré par Salvador Dali, et intimement lié à son amitié avec l’écrivain Garcia Federico Lorca, qui marqua une époque et plusieurs générations.

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Le château de San Ferran, une forteresse imprenable

Au bout de la rue Pujada del Castell, perché sur une colline, le château de San Ferran, est le gardien silencieux de Figueras et des villages alentours. De par ses dimensions impressionnantes, c’est l’une des forteresses défensives les plus grandes d’Europe. Elle fait partie du patrimoine militaire de Catalogne, l’ensemble des fortifications construites au cours de la période historique comprise entre 1500 et 1945, comme celle de Barcelone, à Collioure, ou encore à Salses. Édifiée à partir de 1753 par le commandant du​​ génie militaire Juan Martín Zermeño,  elle renfermait au 18ème et 19ème siècle, jusqu’à 4000 hommes. Avec ses 32 hectares, c’est une vraie ville dans la ville dont la fonction était avant tout dissuasive, pour empêcher l’invasion des troupes françaises dans un lieu frontière comme Figueras. Son architecture est sobre, seulement ornée de tourelles.

©Elise Chevillard

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Des anecdotes et faits historiques parcourent l’histoire du château de San Ferran, comme le service militaire qu’un jeune homme du nom de Salvador Dali aurait fait dans ce lieu, l’emprisonnement de certains des auteurs de la tentative de coup d’État en 1981, son utilisation pendant la Retirada de 1939 ou encore la réalisation de plusieurs films, dont « Le Parfum ».  La visite guidée dure deux heures et se passe à bord d’un 4×4 afin de permettre aux visiteurs de découvrir l’ensemble des ouvrages extérieurs du château, ainsi que les espaces et galeries souterraines dans lesquelles se déroulaient une guerre  de contre-mines. La visite s’achève par un tour en zodiac dans les citernes gigantesques qui se trouvent sous la place d’armes et qui pouvaient contenir jusqu’à 9 millions de litres d’eau. Avant de redescendre vers la ville, le visiteur pourra profiter du point de vue que la région de l’Ampurdan et les vignobles déroule sous ses yeux.

Vinya Garbet, sol de pissarra, celler Castell de Peralada, cap de Creus, DO Empordà Colera, Alt Empordà, Girona

Oenotourisme et route des vins

Il vous faudra vous éloigner un peu de Figueras pour constater l’étendue des vignobles qui l’entoure, du à un climat favorable et contrasté. La tradition vinicole de l’Empordà a plus de 2000 ans d’histoire puisqu’elle remonte à l’époque des Romains, faisant d’elle l’une des plus anciennes de Catalogne. La zone de production de l’AOC Empordà, située à l’extrémité Nord-Est de la Catalogne (depuis Figueres jusqu’au nord vers la frontière avec la France), comprend au total 48 municipalités réparties sur deux régions. Une route surnommée « La route des vins de l’Ampurdan », permet de découvrir sur une quarantaine de kilomètres linéaires cette tradition très enracinée dans cette région. L’AO Empordà rassemble une très grande variété de sols, donnant lieu à un grand choix de vins, comme des cépages de grenache et de carignan, en majorité rouge, ainsi que des rosés et des blancs. Plusieurs vignes se visitent sur la route, comme la cave de Peralada qui organise des visites commentées du vignoble ainsi que des brunch dans les vignes, sans oublier les dégustations de vin.

Ne loupez pas aussi à Figueras la visite du musée de l’Emporda, ( peintures, sculptures, artistes de la région, objets archéologiques).

Un grand merci à l’agence de communication Tryptic et à Empordà Tourisme.