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Où trouver le Cambodge à Paris ?

Par Elise Chevillard / Publié le 21.01.2020

Si le Cambodge évoque en premier lieu au voyageur  les temples d’Angkor -berceau de la grande civilisation khmère- , il est aussi un pays à la beauté authentique et sauvage, encore préservé du tourisme de masse. Du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, au fil du fleuve roi le Mékong, on découvre des îles encore vierges et paradisiaques, des plantations de poivre, des paysages de rizières, des hauts plateaux couverts de jungle, des lacs où se sont installés des pécheurs. Ce pays aux mille facettes, se retrouve un peu dans Paris, que ce soit à la Cité internationale, dans les assiettes de ces restaurants cambodgiens, ou bien encore lors de fêtes traditionnelles et religieuses.

Source: La Cité Internationale

Ancienne colonie française ( Indochine) jusqu’en 1954, le Cambodge conserve donc avec la France des liens très forts de par son histoire. Les descendants de Cambodgiens émigrés à Paris, après avoir fui le régime communiste dans les années soixante-dix et quatre-vingt-dix, se sont installés dans le quartier Belleville, mais aussi dans le 13ème arrondissement.

La Maison du Cambodge à la Cité internationale 

C’est un univers en miniature, un tour du monde en 34 hectares. La Cité internationale de Paris (14e) est un lieu de vie, d’étude et de patrimoine. Les 40 pavillons qui encadrent les pelouses, redessinent une carte du monde où l’Inde est voisine du Brésil. Chaque année, la Cité accueille plus de 140 nationalités différentes.

Située en face de la grande pelouse, la Maison du Cambodge héberge plus de 200 étudiants, et pas seulement des Cambodgiens, même si ces derniers restent prioritaires pour intégrer la maison. Construite grâce à une donation du gouvernement royal du Cambodge faite en 1950, c’est l’une des premières maisons de la Cité, inaugurée en 1957, après l’indépendance du Cambodge. L’architecte français Alfred Audoul qui l’a dessinée, a opté pour un édifice en forme de U, de forme classique et enrichie d’éléments décoratifs Khmers. L’Asie est ainsi évoquée par des sculptures en granit représentant deux singes, symbole religieux dans le pays. Fermée pendant 30 ans suite à de violents incidents qui opposèrent des résidents de la maison dans les années 1970, dans le contexte tendu de la guerre civile qui eut lieu au Cambodge, la Maison réouvre ses portes à la rentrée 2003 après avoir été réhabilitée. Toute l’année, des événements, ateliers autour des traditions cambodgiennes y sont proposés (jeux traditionnels, projections de films, visites du musée Guimet). Chaque samedi, plusieurs associations Khmers font des répétitions, dans la grande salle, de danse traditionnelle et ballet royal, pour petits et grands. Le dimanche, place à la boxe khmer. Lors des festivités du Nouvel An, qui se tient vers la mi-avril, c’est l’occasion pendant un mois de faire rayonner les arts et la culture ici à Paris.

Les associations khmères 

Dans la capitale, de nombreuses associations s’engagent pour divulguer la culture khmère. Ecole khmère de Paris est une association créée dans les années 80 pour aider les jeunes Cambodgiens réfugiés à s’intégrer à l’école, en France. Des cours de soutien étaient proposés dans toutes les matières ainsi que des cours de khmer afin que la jeune génération continue à garder en mémoire sa culture d’origine. Aujourd’hui, quiconque veut apprendre la langue khmère et connaitre le Cambodge peut participer aux cours. Une visite guidée des collections khmères au Musée Guimet est organisée tous les ans pour les élèves.

Et pour approfondir cet apprentissage, l’INALCO, l’Institut National des Langues et Civilisations Orientales, organise également des événements ouverts au public pendant l’année scolaire. Deux autres associations proposent aussi des cours de danse: le Ballet classique khmer et l’Association des artistes associées khmers. Samaki  Kohn Khmer (littéralement « solidarité enfant cambodgien »)  est une association à but non lucratif fondé en 2013 par des jeunes cambodgiens de France, des Khmers de deuxième génération, qui ont eu pour vision de rassembler la diaspora et d’agir ensemble pour  l’avenir du Cambodge. Elle œuvre pour la promotion de la culture cambodgienne et l’aide caritative en ayant pour maîtres mot le partage et la solidarité avec notamment des actions sur Paris.

École Khmère de Pari

Source: École Khmère de Paris

Les arts cambodgiens 

Si le musée national des arts asiatiques ou musée Guimet, est aussi consacré à l’ensemble des pays d’Extrême-Orient, l’art khmer y est cependant bien représenté avec sa collection de sculptures qui est, en dehors du Cambodge, la plus complète au monde. L’exposition permanente dédiée, offre un panorama exhaustif de l’art khmer ancien entre le VIe et le XIXe siècle avec notamment de gracieuses sculptures et des éléments de décors architecturaux. Parmi les plus belles pièces, on peut admirer une statue de Hari Hara provenant de Maha Russey (datant du VIIe siècle), un fronton du magnifique temple de Banteay Srei (fin du Xe siècle) ou encore la tête de Jayavarman VII (fin XIIe-début XIIIe siècle). On peut aussi se régaler du spectacle magique d’un moulage des visages qui ornent le sommet des tours du temple du Bayon à Angkor Vat. Les salles dans lesquelles les objets khmers sont exposées se trouvent au premier niveau du Musée et sont accessibles dès l’entrée.

Dans ce pays où la population est particulièrement jeune, il est intéressant d’entendre ce que justement la jeunesse a à dire, que ce soit par les arts visuels notamment. La galerie Lee a ouvert son espace d’exposition en 1995, en plein cœur du quartier de Saint-Germain-des-Prés à Paris. Dirigée par Lysath Loeuk d’origine Cambodgienne, la galerie expose de nombreux artistes du continent asiatique originaire de la scène artistique cambodgienne contemporaine, actuellement en pleine expansion mais encore peu représentée en France autour de la peinture, de la sculpture et de la photographie. La Galerie Lee a exposé des dessins de Yim Maline en avril 2017, des peintures de Theanly Chov en octobre 2017 et la fameuse série intitulée « In the city by Night » du photographe Sovan Philong, trois des artistes majeurs de cette nouvelle vague cambodgienne.

Jean-Pierre Dalbéra Musée Guimet collections de l'Asie du sud-est Salle du Cambodge

Jean-Pierre Dalbéra, Musée Guimet collections de l’Asie du sud-est. Salle du Cambodge. Flickr 2.0 Generic (CC BY 2.0)

La Grande Pagode de Vincennes

Située dans le bois de Vincennes, la Grande Pagode est un vestige de l’exposition coloniale de 1931, affecté au culte bouddhiste depuis 1974. Le temple qui s’étend sur 8 000 mètres carrés et abrite la plus grande statue de Bouddha d’Europe (près de 10 m), recouverte d’or.

Bouddha de la Pagode de Vincennes. Source Wikipédia

Bouddha de la Pagode de Vincennes. Source Wikipédia

Depuis 35 ans, toutes les grandes fêtes des communautés bouddhistes installées en France sont célébrées dans ce lieu. A la mi-avril, le Nouvel An khmer, le « Chol chnam thmei » marque la fin de la saison sèche. Le temps d’un weeek-end, la communauté khmère et les curieux se retrouvent ici où un bal et une kermesse y sont organisés, rythmés par les cérémonies bouddhistes guidées par les bonzes parés de leurs chatoyantes toges oranges et jaunes. A l’extérieur, les étals regorgent de babioles, de vêtements, de bijoux et de plats typiquement cambodgiens dont les odeurs rappellent celles des marchés de Phnom Penh. C’est aussi l’occasion de rentrer dans la grande pagode qui ne se visite pas habituellement. La Fête des morts ou pchum benn a lieu courant octobre. Cette journée qui clôture la Quinzaine des Défunts, est primordiale pour tous Cambodgiens, d’ici ou d’ailleurs. C’est l’occasion de se réunir entre proches, commémorer les défunts, écouter les récitations des moines et manger ensemble.

Source : Restaurant La Mousson

Les restaurants cambodgiens 

Prahok, (poisson saumuré), Amok, (poisson cuisiné à la noix de coco), gâteaux de banane au riz gluant roulés dans des feuilles de bananier, samla chapek, (soupe de porc au gingembre)… La cuisine Cambodgienne n’a rien à envier à celle de ses voisines Vietnamiennes et Thaïlandaises, à la fois raffinée, et aux notes complexes de citronnelle et de gingembre. Concentrés dans le 13ème arrondissement de la capitale, plusieurs restaurants vous promettent un voyage culinaire au pays du sourire, pour goûter au amok, le plat national, si ce n’est pas le boeuf Lok Lak. La simplicité des plats n’est qu’apparente car s’entremêlent des épices et des accords. On retiendra le restaurant Mondol kiri, Hangmeas, Chheng Sim, un restaurant dans la galerie marchande du 13eme et Bambou d’or.

Source: Flickr Sodanie Chea. Plat Amok Flickr 2.0 Generic (CC BY 2.0)

Situé dans le 15ème arrondissement, La Mousson, est l’un des plus vieux établissements khmers de la capitale.  La décoration est sobre, l’accueil chaleureux.  A la carte, des plats typiquement cambodgien mais aussi avec des influences françaises. Cheveux d’ange dorés frits en entrée, ou Demoiselle de Mékong, les noms font déjà voyager. La spécialité de la maison ? Peut-être ce délicieux Num Banhchok Nam Ya, vermicelle de riz poulet et crabe au lait de coco. Pour poursuivre ce voyage culinaire, le restaurant propose des ateliers de cuisine . Sans oublier le petit Cambodge et Restaurant le Phom Penh Saigon, Pour faire vos courses, rendez-vous au Cambodian Market Food.

Autres adresses:  L’Ambassade du Cambodge à Paris. On trouve aussi dans les magasins Altermundi la marque Soieries du Mékong, une marque cambodgienne. Les foulards et des écharpes sont tissés à la main sur des métiers traditionnels, par des femmes cambodgiennes.