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Grenoble : « Au bout de chaque rue, une montagne »

Par Elise Chevillard / Publié le 09.02.2017
Entre ruelles médiévales, petites places colorées aux parfums italiens et horizons naturels, bienvenue à Grenoble, la métropole des Alpes Françaises. Celle qui a vu naître et grandir l’écrivain Stendhal, se livre au rythme de nos pas.
 

Grenoble (Photo: indicpeace via Flickr)

Grenoble (Photo: indicpeace via Flickr)
La découverte de Grenoble est marquée par la présence des montagnes, véritables citadelles. S’élevant en majesté au-dessus de la cité dauphinoise, elles veillent sur cette dernière. Où qu’il se pose, le regard s’amuse à rebondir d’un sommet à l’autre, des crêtes du Vercors à l’ouest jusqu’à la Chartreuse au nord en passant par Belledonne au sud-est. Dans la ville, les trois grands massifs, appelés aussi « les joyaux de la couronne » par l’historien Robert Bor¬necque, imposent leur présence rassurante au bout de chaque rue. Mais Grenoble ne se résume pas qu’à ses montagnes… Déambuler dans son cœur historique, c’est un peu comme effectuer un voyage dans le temps. On parcourt 2000 ans d’histoire, depuis les origines de la ville jusqu’au XXe siècle à travers un patrimoine architectural unique. On y croise des vestiges, comme l’enceinte gallo-romaine de la rue Lafayette, bâtie entre 286 et 293 après JC. Mais aussi des hôtels particuliers aux belles portes en noyer, qui datent d’avant la Révolution. Sans oublier les innombrables façades Art nouveau qui se dévoilent ainsi que leurs histoires, si on fait attention à lever les yeux.
 
Nez en l’air et pieds sur le pavé
Place Sainte-Claire, les halles du même nom abritent un joli marché couvert. Construites dans l’esprit des anciennes halles de Paris, elles ont été rénovées en 1990 dans les règles de l’art. Des colonnes de fontes supportent une charpente de fer, le tout surmonté de belles arcades vitrées laissant filtrer la lumière naturelle. Un peu plus loin, on pénètre dans le quartier des Antiquaires aux façades surannées : bouquinistes, antiquaires d’objets d’arts, tapissiers… Ici, le temps semble s’être suspendu, à l’image des vieilles horloges exposées dans les vitrines.
Au détour de la rue Bayard, une petite place intime : la place des Tilleuls. Dans les rues adjacentes à la place Notre-Dame, rue Brocherie et rue Chenoise on croise de nombreuses maisons anciennes dont celle gothique au 10 rue du Pont Saint-Jaime. Et toujours au bout de chaque rue, une montagne, comme l’écrivait Stendhal. À l’approche de la place Saint-André, l’ambiance devient plus lumineuse et méridionale. La façade bicolore de l’ancien Palais du Parlement fut édifiée en 1453 par Louis II. Mélangeant lignes gothiques et renaissances, elle est ornée de blasons et d’animaux en tous genres.
Pour une halte gourmande, arrêtons-nous à la Ferme à Dédé. Nappes à carreaux rouges, objets vintage, serveurs en habits traditionnels…L’ambiance y est festive, façon « refuge de montagne. » En cuisine, ça fume, le fromage fond et les ravioles au persil dorent dans le four.
La balade reprend sur la place de Gordes, la plus belle de Grenoble. Entre platanes et fontaines, il y souffle un vent venu d’Italie. Un peu à l’écart de l’animation du centre, le Jardin de Ville a conservé de son origine, (au début du XVIIe siècle), un vaste espace boisé et un jardin de fleurs occupé désormais par une roseraie. Plus loin, sur la place Grenette, la belle fontaine en pierre avec ses dauphins chevauchés par des génies ailés, est signée du sculpteur Victor Sappey. Vos pas vous mèneront sûrement aux marronniers de la place Victor Hugo. Dans les rues alentour, les frises et les bestiaires en ciment moulé sur les façades, témoignent de l’importance de ce matériau dans l’architecture grenobloise de la fin du XIXe siècle. Epoque durant laquelle la cité vit un écrivain fouler ses pavés…
Si Stendhal m’était conté
Aujourd’hui encore, on peut découvrir de nombreux lieux qui ont profondément marqué la jeunesse grenobloise du célèbre écrivain romantique. Son roman autobiographique Vie d’Henri Brulard voit son intrigue se dérouler dans le Grenoble du XIXe siècle. En 1827, la prison du Palais de Justice compte parmi ses détenus, pour la durée de son procès, un jeune séminariste nommé Antoine Berthet. Cette affaire deviendra la source d’inspiration de Stendhal pour Le Rouge et le Noir.
Dans le centre, un itinéraire historique lui est dédié et conduit les visiteurs sur ses traces. Le numéro 14 de la rue Jean Jacques Rousseau vit naître Stendhal en 1783. Dans cet appartement typique de l’habitat bourgeois du vieux Grenoble, on se consacre aujourd’hui à des ateliers de lecture et d’écriture, animés par la Bibliothèque municipale. Dans la Grand-rue on trouve le musée Stendhal dont le but est de sensibiliser le public à l’œuvre de l’écrivain. Des expositions temporaires y sont régulièrement organisées. Bien qu’il ait dit détester Grenoble, qu’il qualifiait dans ses mémoires de « nid à rats », Stendhal adorait le jardin de Ville. Il aimait y observer les passants.
La Tour Perret : un phare sur les montagnes
Quittons maintenant le centre ville pour se diriger vers la Tour Perret. En chemin, on traverse la place de Verdun. Les édifices en pierre calcaire qui l’entourent, illuminent la place. Point de repère pour se repérer dans la ville, lieu de rencontre, phare dans la nuit, la Tour Perret siège au milieu du Parc Paul Mistral. Inauguré en 1925 pour l’Exposition universelle, ce parc s’étend jusqu’aux berges de l’Isère. On doit cette tour octogonale à l’architecte Auguste Perret, construite pour l’Exposition. Elle est ainsi devenue son symbole (c’est le seul témoin encore debout aujourd’hui), symbole de la Ville mais aussi de l’architecture cimentière. Conçue en béton armé et finement ciselé, elle est haute de 95 mètres. Le jour, elle file étrangement le cafard, la nuit, elle illumine Grenoble de sa lumière bleue. On l’appelle : « la tour pour regarder les montagnes ».
Alors que le soleil décline, commence un jeu de cache-cache entre lui et les montagnes. Soudain, elles s’embrasent, rougeoyantes. Entre chien et loup, elles deviennent encore plus imposantes, les ombres les découpant sur le ciel. Le soleil disparaît ensuite entièrement derrière les massifs. Ainsi, dit-on de Grenoble qu’elle ne connaît jamais de coucher de soleil.