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Bagan, au royaume des pagodes

Par Laurie Goret / Publié le 07.05.2018

C’est l’image la plus connue du Myanmar. Celle d’une Asie mythique encore préservée de toute influence occidentale. Bagan est l’ancienne capitale du royaume de Pagan, le premier empire birman. Un site archéologique majeur du patrimoine culturel national, qui compte quelque 2 800 temples bouddhiques construits entre les IXe et XIIIe siècles.

Coucher de soleil sur Bagan (Photo : Llee Wu via Flickr)

Le Myanmar (ou Birmanie) s’ouvre au monde. C’est l’un des pays les plus difficiles d’accès lorsqu’en 2011, la junte militaire qui règne d’une main de fer rend officiellement le pouvoir aux civils. Certaines frontières restent fermées. Néanmoins, les touristes peuvent enfin découvrir les merveilles cachées du Myanmar…

Une traversée au long cours

Etabli dans la plaine centrale du Myanmar, le site de 50 km2 est bien desservi par les transports. Avion, train ou bus, vous avez le choix ! Je choisis une option alternative, certes plus longue (comptez dix heures de trajet), mais qui permet de voir du pays : la traversée sur l’Ayeyarwady. Ce fleuve relie Mandalay à Bagan. C’est la destination la plus prisée de tout le pays par les touristes. A bord, on parle surtout allemand et chinois. Le voyage est calme et reposant, contemplatif.

Arrivée à bon port après une journée de bateau, j’assiste au débarquement, assez chaotique. Sur la rive il n’y a ni port ni quai. Les habitants construisent un pont fait d’une poutre en bois et d’une rambarde en bambou. Comme les autres vacanciers, je regarde la scène en me demandant comment faire pour descendre indemne avec mon gros sac à dos. Dépaysement garanti!

Une fois sur la terre ferme, je dois trouver un hébergement. Bagan ne ressemble pas à une ville. C’est un ensemble de trois bourgs reliés les uns aux autres par quelques routes goudronnées et des pistes de sable, au beau milieu d’un champ de pagodes appelées “stupas”.

Les logements les plus proches se situent à Nyaung U, le point d’entrée principal du site avec une gare, un aéroport et une jetée pour les bateaux. J’y trouve une guesthouse bon marché peuplée de backpackers. A quelques kilomètres de là, New Bagan propose des logements un peu plus aisés, tandis que Old Bagan concentre le nec plus ultra : des habitations haut de gamme situées dans la plaine, avec une vue directe sur les temples.

L’histoire secrète des temples

Des stupas, il y en a partout et pour tous les goûts : en briques rouges, en or, ou immaculés de blanc. Certains renferment des fresques d’époque retraçant la vie de Bouddha. Tous abritent une statue du sage au minimum, si ce n’est quatre ou cinq.

Les temples sont accessibles par des pistes sableuses pendant la période sèche. En vélo, en calèche ou en scooter électrique (à 40 à l’heure, on ne risque rien !), on déambule d’un temple à l’autre dans un décor quasi désertique, croisant au passage quelques troupeaux de brebis.

Bien souvent, des vendeurs de peintures sur sable ont élu domicile à l’intérieur des stupas. C’est la spécialité artistique de Bagan. Au fil des toiles, l’histoire du bouddhisme défile sous les yeux des visiteurs. Il est possible de grimper sur quelques pagodes par des escaliers certes très abruptes, mais ça vaut le coup. Elles offrent des points de vue vertigineux sur toute la plaine.

Difficile de dresser l’inventaire de ces pagodes d’un autre temps, il y en a beaucoup trop. La plus belle est Ananda, dédiée à la sagesse infinie du Bouddha; la plus massive, Thatbyinyu; et la plus prestigieuse, Shwezigone. Elle aurait été construite au XIIe siècle pour abriter un os de la mâchoire et une dent du Bouddha.

Certaines d’entre elles cachent aussi des secrets de famille…Dhammayangyi, un immense temple fortifié du XIIème siècle, renferme entre ses murs une histoire sanglante.

Le temple Dhammayangyi (Photo : Brice Lefèvre)

Selon la légende, le roi Narathu l’aurait construit pour expier ses pêchés. Il avait effectivement étouffé son père et son frère avant de tuer sa belle pour pratique de rites hindous. Le monarque était tellement maniaque qu’il tranchait le bras des ouvriers qui n’emboitaient pas parfaitement les briques du bâtiment les unes avec les autres. Le résultat devait être impeccable.

A quelques kilomètres de là se dresse le stupa Sisa Nar. De l’extérieur, il semble impossible d’y entrer. Mais Tcho Tcho, le gardien des clés, vient à ma rencontre.

Ouvrez l’œil : une fenêtre minuscule a été construite dans le mur de briques. Selon Tcho Tcho, elle permet d’accéder à un tunnel construit à l’intérieur du temple. Il mène à un trésor : un bouddha sans tête, laissé comme tel par les Japonais en 1945. Ils ont pris la relique et d’autres statues mais ont épargné le corps, trop lourd à transporter…

A Bagan, une journée ne saurait se terminer sans le traditionnel coucher de soleil. Perchée en haut d’un temple, j’assiste au spectacle, saisissant. Certains vacanciers volent au-dessus des stupas : ils contemplent le paysage à bord d’une montgolfière. Il faut compter entre 330 et 400 dollars les 45 minutes de vol. Une attraction très prisée, à réserver bien à l’avance !

Vol au-dessus des pagodes, ©Brice Lefèvre